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FIGURES,
PIECES OU MEUBLES QUI COUVRENT L'ECU
On
appelle figures ou meubles tous les objets qui se placent sur le champ
de l'écu. Leur nombre est infini, car chacun d'eux représentant un fait
honorable, un voeu, un souvenir ou même un caprice, on conçoit quelle
quantité d'objets peut être employée en armoiries. La guerre, la
justice, les sciences, souvent même les épisodes de la vie privée, sont
venus payer leur tribut au blason, en apportant tous les signes par
lesquels on pouvait en caractériser les différents traits.
On a longtemps répété que les armes les plus simples indiquaient la
plus pure noblesse. Ce fait, qui peut être vrai, admet cependant un
grand nombre d'exceptions. Des familles possédant des armes très
simples en ont vu successivement multiplier les meubles à mesure que
des membres se distinguaient et obtenaient du souverain le droit
d'ajouter à leur écusson quelque pièce commémorative d'une belle
action. Ainsi notre première maison de France, celle de Montmorency,
portait originairement d'or à une croix de gueules. Bouchard de
Montmorency ajouta quatre alérions comme marque des quatre enseignes
impériales conquises par lui sur l'armée de l'empereur Othon en 978.
Mathieu de Montmorency porta ce nombre à seize, à cause des douze
enseignes qu'il prit à la bataille de Bouvines, en 1214.
Les figures sont de quatre sortes: 1°, héraldiques; 2°, naturelles; 3°,
artificielles; 4°, chimériques.
FIGURES
HERALDIQUES
On
nomme ainsi des figures formées de divers signes de convention, et qui
sont du plus grand usage en armoiries. On les divise en pièces de
premier ordre ou honorables, pièces du second ordre, et pièces du
troisième ordre.
Pièces
héraldiques de
premier ordre ou honorables
Elles sont au nombre de douze, savoir: le chef, le pal, la fasce, la
bande, la barre, la croix, le sautoir, le chevron, la bordure, le
franc-quartier, l'écusson en coeur et la champagne. Elles sont très
fréquemment employées; leur dimension est toujours du tiers de l'écu,
sauf pour le franc-quartier, qui n'est que du quart à peu près.
Les anciens auteurs n'en reconnaissaient pas autant; mais, sous
l'empereur Napoléon, le blason ayant été en quelque sorte reconstitué,
on a admis douze pièces honorables, parmi lesquelles la champagne, qui
n'y figurait jamais auparavant.
Le chef
On le place à la partie supérieure de l'écu, dont il occupe
ordinairement le tiers. Il représente le casque du chevalier, le
bourrelet, ou même la couronne qui couvre toujours sa tête. |

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Le pal
Il est le hiéroglyphe de la lance du chevalier, et du poteau surmonté
d'armoiries que chaque baron faisait dresser devant sa tente ou devant
le pont-levis de son manoir: c'était une marque de juridiction. On le
place dans le sens vertical. |

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La fasce
C'est la ceinture du chevalier, dont elle reproduisait la couleur et
les ornements. Sa dimension est du tiers de l'écu, et elle en occupe,
le milieu dans le sens horizontal. |

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La bande
Cette pièce représente l'écharpe passée sur l'épaule, ou le baudrier de
l'épée. On l'obtient au moyen d'une diagonale tirée de l'angle
supérieur de droite à l'angle inférieur de gauche. |

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La barre
Elle représente aussi l'écharpe du chevalier, mais disposée dans un
sens contraire, c'est-à-dire de gauche à droite. Adoptée comme signe de
bâtardise, elle a donné lieu à cette expression: né du côté gauche,
appliquée à un enfant illégitime. Dans ce cas, elle est ordinairement
diminuée de largeur. Celle qui occupe le tiers de l'écu ne peut être
considérée comme marque de bâtardise. |

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La croix
C'est le signe de notre rédemption, qu'adoptèrent naturellement les
preux dont la dévotion égalait la bravoure. On la forme au moyen de la
réunion du pal et de la fasce. Le fameux labarum de Constantin n'était
autre chose que la croix, et elle fut adoptée comme un signe de piété
ou de services rendus à la religion. Les événements en ont fait varier
les formes à l'infini, et nous donnerons un chapitre spécial pour
indiquer les plus usitées.
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Le sautoir
On l'obtient au moyen de la bande et de la barre, dont il est la
réunion. Quelques auteurs l'ont considéré comme représentant l'étrier,
mais il est plus probable qu'on ne doit y voir qu'une variété de la
croix. Un fait à l'appui de cette opinion, c'est qu'il est encore nommé
croix de Saint-André, ou croix de Bourgogne. Ses formes sont aussi
variées que celles de la croix. |

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Le chevron
Le chevron à la forme d'un compas ouvert dont le point de réunion des
deux branches serait vers le chef de l'écu. Il est l'emblème de
l'éperon, et on l'a pris encore pour le signe hiéroglyphique des
toitures de châteaux, des machines de guerre, et des tours de bois en
usage dans les sièges. |

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La bordure
Cette pièce enveloppe l'écu sans le couvrir entièrement, et est un
symbole de faveur et de protection. Les souverains l'accordent comme
récompense d'un service signalé, indiquant de cette manière qu'ils
défendent celui qui en est décoré contre les embûches de ses ennemis. |

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Le franc-quartier
Il occupe un peu moins du quart de l'écu, et se place à l'angle
supérieur à dextre. Souvent il sert de brisure. |

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L'écusson en coeur
Plus petit des deux tiers que l'écusson principal, il en occupe le
centre ou coeur. C'est presque toujours une concession d'un souverain,
ou encore une marque d'amour de la part de celui qui le porte. Souvent
dans un tournoi, un chevalier plaçait ainsi au centre de son écu un
signe, un rébus, une couleur qui ne pouvaient être compris que de la
dame de ses pensées. |

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La champagne
Cette pièce, qui occupe le tiers inférieur de l'écu, est rarement
employée en armoiries; aussi peu d'auteurs la placent-ils au nombre des
pièces honorables ou du premier ordre. L'usage en a cependant été
consacré dans les armoiries concédées par l'empereur Napoléon, où elle
figure au nombre des pièces honorables. Les armoiries accordées
aujourd'hui lui conservent le même privilège. |

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Figures
héraldiques de
second ordre
Ces figures, que quelques auteurs ont comptées au nombre des pièces
honorables, sont d'une origine plus récente, et par conséquent d'un
usage moins fréquent que ces dernières. La majorité des héraldistes les
ayant toujours séparées des pièces honorables, nous sommes obligés de
nous conformer à cette autorité, tout en reconnaissant que la réunion
des unes et des autres simplifierait beaucoup les règles du blason.
Le nombre de ces pièces s'élève à huit seulement: le pairle, le canton,
le giron, l'orle, le trescheur, la pointe, la pile, le lambel.

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Le pairle.
Il se compose de trois rayons partant du centre de l'écu et s'étendant
vers les deux angles du chef et le milieu de la pointe, ce qui lui
donne la forme d'un Y grec. Sa signification est incertaine, et n'a
jamais été déterminée d'une manière positive par tous ceux qui se sont
occupés de la science héraldique. Quelques-uns croient y voir la
représentation de la sainte Trinité; d'autres, celle des trois vertus
théologales. Je possède un manuscrit du seizième siècle, où l'auteur
soutient que le pairle est l'emblème de ces trois grandes dévotions du
chevalier: son Dieu, son roi, sa dame. Cette dernière explication
paraîtrait assez plausible, s'il n'était plus simple de n'y voir que la
réunion du pal, de la bande et de la barre, chacun pour la moitié de sa
longueur. |

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Le canton.
Plus petit que le franc-quartier, il n'occupe que le neuvième de l'écu,
et se place tantôt à l'angle dextre, tantôt à l'angle sénestre du chef. |

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Le giron.
Il n'est autre chose qu'un des quartiers du gironné, et s'entend
ordinairement de celui qui se meut de la partie supérieure du flanc
dextre. |

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L'orle.
C'est une bordure réduite à la moitie de sa largeur ordinaire, et
séparée des bords de l'écu de toute la partie qu'on lui a retranchée. |

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Le trescheur ou essonnier.
On nomme ainsi l'orle rétréci dans sa largeur. Il est presque toujours
double, et souvent orné de fleurons ou de fleurs de lis. |

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La pointe.
Pièce triangulaire occupant les deux tiers de la base, et montant en
angle aigu jusqu'au chef. Quelquefois elle se meut d'un des flancs de
l'écu, et il faut l'exprimer en blasonnant, c'est-à-dire remarquer
qu'elle est posée en fasce, en bande, en barre, etc. Elle doit
nécessairement diminuer de largeur à sa base, lorsqu'elle se trouve
multipliée dans l'écu. |

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La pile.
C'est la pointe renversée. Elle peut aussi être multipliée dans l'écu;
dans ce cas elle diminue de largeur. |

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Le lambel.
Le lambel représente un morceau d'étoffe que l'on emploie le plus
souvent pour indiquer une brisure de branche cadette. C'est très
rarement qu'on le trouve sur l'écu comme charge principale. Il peut
avoir depuis trois pendants jusqu'à neuf. |
Figures
héraldiques de
troisième ordre
On comprend sous ce nom une quantité de figures carrées ou rondes que
l'on emploie en armoiries, et à la plupart desquelles on a donné des
noms particuliers. Les figures carrées sont le hiéroglyphe de l'homme
de bien qui se montre toujours le même sous toutes ses faces; les
figures rondes rappellent le souvenir des convois enlevés à l'ennemi,
du ravitaillement des armées, souvent aussi de la rançon exigée des
prisonniers, ou de celle que l'on avait payée soi-même pour se racheter
des infidèles. Ces pièces ont été considérées comme pièces héraldiques,
parce qu'au moyen de certaines combinaisons on peut les employer pour
couvrir entièrement l'écu, et leur faire représenter ainsi une sorte d'
émail, comme on le verra quand il sera question des sécantes partitions.
Les billettes
Ce sont des pièces de bois carrées, un peu plus longues que larges, et
posées à plat sur l'écu. |

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Les carreaux
Pièces de bois tout à fait carrées, et posées comme les billettes. |

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Les losanges
Pièces carrées un peu allongées et posées sur un des angles. |

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Les fusées
Losanges très effilés, et quelquefois légèrement arrondis aux angles
des flancs. |

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Les macles
Ce sont des losanges percés à jour au moyen d'une ouverture carrée. |

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Les rustes
Macles ouverts en rond. |

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Les besants
Figures rondes représentant les pièces de monnaie, et pour cette raison
toujours de métal. |

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Les tourteaux
Sont de même forme que les besants, mais de couleur. |

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Besants-tourteaux
Besants composés à la fois de métal et de couleur. On les reconnaît en
ce qu'ils se trouvent toujours sur un champ de couleur. |

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Tourteaux-besants
C'est le contraire des besants-tourteaux. Ils sont placés sur un champ
de métal. |

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Sources
:
Traité complet de la Science du
Blason, J. d'Eschavannes - 1885
Noblesse, blason, ordre de chevalerie : manuel héraldique, E. Dentu -
1859
Trésor héraldique, A. de La Porte - 1864
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